Il y a 25 ans, j’avais presque 25 ans et mon collègue Michel Santi et moi-même avons entrepris de lancer sur le campus d’HEC le programme « Challenge + », un dispositif de formation et d’accompagnement de créateurs d’entreprises innovantes dont nous n’imaginions pas qu’il nous apporterait autant de satisfactions.

Depuis lors, nous avons accompagné plus de 500 entrepreneurs pour les aider à inventer, au sens étymologique du terme, l’entreprise qui leur ressemble. Parmi les premiers lauréats, nous avons eu le plaisir d’accompagner le fondateur et président du Cube, Nils Aziosmanoff. Son association a pris son envol à partir des caves du château du l’Eglantine à Jouy-en-Josas et Art3000/Le Cube est devenu en l’espace de 25 ans une référence internationale en matière de création numérique.

Mon collègue Frédéric Iselin a pris les rênes de Challenge + à la fin de l’an 2000 et a contribué à faire de ce programme un véritable label en matière d’accompagnement des créateurs d’entreprises innovantes. Il rectifierait d’ailleurs ma phrase en me demandant de parler désormais de « HEC Challenge + »… Pour créer une belle startup, il n’est plus nécessaire de prendre un aller simple pour la Californie. Il est de plus en plus sensé de prendre la direction du Plateau de Saclay, où se développe sous nos yeux un écosystème d’innovation d’une incroyable vitalité.

Le paysage de la création d’entreprises innovantes a beaucoup évolué en l’espace d’une génération, notamment avec l’apparition des incubateurs, du statut Jeune Entreprise Innovante, du financement participatif et, plus récemment encore, du statut étudiant-entrepreneur qui facilite la création d’entreprise parallèlement à ses études supérieures. D’autres évolutions suivront, au service de cette noble cause dont l’économie a tant besoin et qui permet à des femmes et des hommes de contribuer à changer le monde par la seule force de leurs idées et de leur pouvoir de conviction.

Il y a plus d’un siècle, Mark Twain écrivait : « Dans vingt ans vous serez plus déçus par les choses que vous n’avez pas faites que par celles que vous avez faites. Alors sortez des sentiers battus. Mettez les voiles. Explorez. Rêvez. Découvrez. »… A la même époque, le poète et philosophe Ralph Waldo Emerson disait à peu près la même chose en d’autres termes : « N’allez pas là où le chemin peut mener. Allez là où il n’y a pas de chemin et laissez une trace ». A l’heure où l’idéologie du progrès est battue en brèche, il se trouvera toujours des entrepreneurs qui rêveront de changer le monde et qui, ne sachant pas que c’est impossible, le feront réellement !

Francis Blanche affirmait que « face au monde qui bouge, mieux vaut penser le changement que changer le pansement ». C’est finement observé, même si certaines évolutions sociales, politiques, technologiques, économiques et environnementales sont susceptibles d’engendrer des blessures si profondes que les compresses du Docteur Blanche ne sauraient soigner à elles seules…

La refondation du monde est à l’œuvre depuis l’avènement d’homo sapiens et, en matière de coopération entre individus, nous nous ingénions souvent à réinventer la roue. Néanmoins, les nouvelles technologies nous permettent de créer de nouvelles formes de solidarité et nous donnent de réels motifs d’espoir. Par-delà les révolutions et les conflits qui ont ponctué, jusque très récemment encore, la brève histoire de l’humanité, nous parviendrons très probablement à créer une société plus juste, plus sûre et plus respectueuse de notre environnement… même s’il paraît que je suis un optimiste indéfectible !!!

Etienne Krieger

[Krieger E., « De la Silicon Valley à « Silicon Saclay » : une génération d’innovations », La Revue du Cube #9, « Refondation », Décembre 2015]

www.cuberevue.com/silicon-valley-silicon-saclay-generation-dinnovations/4361